Concoctée par Motorsport, le département compétition de BMW, la M3 devint rapidement l’une des valeurs étalon du rallye, en remportant dès 1987 une victoire de portée mondiale au Tour de Corse, aux mains de Bernard Béguin. Trente ans plus tard, celle-ci trouve un nouveau terrain de jeu en VHC, par le biais de la catégorie J2 : nous avons pu essayer l’auto de Serge Cazaux, dont la carrosserie mythique adresse un sympathique clin d’œil aux grands noms du rallye.
Texte Lionel Robert – Photos Christian Chiquello
L’anniversaire des débuts en rallye de cette auto (en 1987, un an après la présentation du modèle de série) colle bien à l’actualité puisque la FFSA a autorisé, cette année, les voitures de la période J2 (1986 à 1990) à marquer des points en Championnat de France des Rallyes VHC. Déjà admises l’an passé, celles-ci évoluaient toutefois hors-classement en Championnat et Coupe de France. Cela peut paraître étrange de voir arriver dans le monde des anciennes une voiture de rallye encore compétitive parmi les modernes mais l’âge figurant sur sa carte d’identité confirme que, pour elle aussi, 30 ans se sont écoulés depuis ses débuts. La fin du Groupe B a conduit les constructeurs vers la conception d’une voiture pouvant être homologuée en Groupe N et en Groupe A. Pour cela, il fallait être capable de produire 5000 exemplaires du modèle de base, ce qui exclut de fait la réalisation d’une petite série exclusive pour la course. Lancia proposa donc une version Delta 4 roues motrices, Ford lança la Sierra Cosworth et BMW choisit le segment de marché de la série 3 pour confier à son département Motorsport le développement d’une version ultra-sportive, la M3. La voiture est manifestement bien née mais le constructeur vise surtout les courses européennes en circuit pour lesquelles il s’engage officiellement (4 victoires aux 24 Heures de Spa-Francorchamps et champion du monde des voitures de Tourisme en 1987 avec Roberto Ravaglia). Pour le rallye, le développement et l’assistance course sont confiés à Prodrive, la structure de David Richards. Dans le contexte assez restrictif du Groupe A, où beaucoup d’éléments comme l’admission et l’échappement doivent être conformes au modèle de série, les Anglais vont faire un travail remarquable puisque dès la première année, Bernard Béguin remportera le Tour de Corse. L’écurie officielle Prodrive sera présente plusieurs années avec ses M3 aux couleurs des cigarettiers avant de travailler pour Subaru au développement de la Legacy puis de l’Impreza (voir notre essai dans EC n°74).
Une deux roues motrices fabuleuse
Les motivations d’achat de Serge Cazaux, le boss de RSC, sont tout autant économiques, financières, sportives et sentimentales. Financières parce qu’une bonne M3 peut se trouver entre 120 et 150 000 € (une M3 collector peut se négocier à 200 000 € lorsque le palmarès est fourni). Certes, cela fait un peu d’argent mais bien moins que pour l’achat d’une 037 par exemple, et sur un modèle dont la cote est plutôt en hausse maintenant qu’il est accepté en rallyes historiques. Economiques parce que cette voiture du Groupe A coûte moins cher en exploitation course qu’une auto du Groupe B. Sportives parce que le niveau de performance d’une BMW M3 bien préparée est très élevé. Il s’agit d’une deux roues motrices fabuleuse qui, comme évoqué plus haut, n’est pas ridicule en rallye moderne ; en historique c’est une voiture pour le podium presqu’à chaque fois. L’aspect sentimental n’est pas à dédaigner car cette voiture reste l’une de celles qui ont marqué leur époque et pour enfoncer le clou, Cazaux a eu la très bonne idée de concevoir une décoration dans l’esprit « art car » qui rend hommage aux légendes du rallye. Voilà qui devrait attirer les regards des spectateurs mais aussi les remarques de certains passionnés s’ils ne trouvent pas le nom de leur idole sur la carrosserie de la belle allemande. Serge a donc chargé son rabatteur numéro 1, Henri Depons, de lui trouver une bonne M3. Franck Morel, pilote assidu en circuit mais aussi pratiquant en rallye, lui a vendu la voiture l’an passé après l’avoir acheté à l’hiver 2015 et disputé quelques rallyes VH avec elle. Franck concède que la M3 a un gros potentiel mais n’ayant pas assez roulé avec, il préfère courir avec la Porsche qu’il connaît sur le bout des doigts. Il s’agit d’une reconstruction récente effectuée il y a une dizaine d’années par Arnaud Choquet, un pilote nordiste, sur la base d’une vraie caisse de M3. Henri nous explique : « Plus qu’une auto à palmarès, il était important pour nous de partir sur une base saine déjà équipée des bonnes pièces. Cette voiture nous a de suite inspiré confiance et nous avons eu assez peu de travaux à faire dessus. En collaboration avec Hugues Delage, pilote et préparateur réputé basé à Villeneuve-sur-Lot, qui est un ami, nous avons surtout cherché à optimiser la performance par la pose de meilleurs amortisseurs et la mise en place de triangles renforcés. Les porte-moyeux et plus globalement les liaisons au sol ont été révisés avec l’ami Hugues. Le travail était facilité car la caisse était bien réalisée et n’avait pas été accidentée. Aujourd’hui, elle dispose d’un arceau multipoints, d’une boîte Sadev à 6 rapports et d’un pont Motorsport renforcé. Le moteur avait été réalisé par José Rocher à l’époque du précédent propriétaire. Il est ensuite repassé chez Duquenne Moteurs et supervisé par le même José. Tout ceci nous permet aujourd’hui de disposer d’une maxi Groupe A. » En début d’année, RSC choisit de disputer le rallye de la Fougère pour y effectuer de la mise au point. Un rallye local que l’équipe a remporté avant de se tourner vers des épreuves plus relevées.
Au volant
Selon un rituel entre Henri et moi (voir nos essais précédents), je le laisse d’abord faire deux ou trois tours pour qu’il me montre le fonctionnement de l’auto en dynamique. J’ai juste le temps de poser mes talons sur le bac repose pieds du copilote. Celui-ci s’enfonce d’ailleurs un peu trop sous la pression du passager « sac de sable » que je suis. Cela permet aussi de chauffer le moteur et les freins pour que tout soit en ordre de marche quand je prends le volant. Pendant que je m’installe à bord, mon collègue photographe s’équipe de sa tenue étanche pour aller affronter la pluie. Au moment où je suis prêt à emprunter la piste du circuit de Fontenay-le-Comte, celle-ci redouble d’intensité et j’apprécie que mon essai du jour soit celui d’une voiture équipée d’un toit… (…)
Retrouvez l’intégralité de l’essai dans Echappement Classic n°79 (juillet 2017) en vente en kiosque ou en ligne sur hommell-magazines.com