Auteur du livre consacré au centenaire du Rallye Monte-Carlo, Jean-François Jacob a également participé quatre fois à l’épreuve en tant que coéquipier, avec en point d’orgue la troisième place obtenue en 1969 en compagnie de Jean Vinatier. Et ce malgré une erreur qu’il juge impardonnable !
Propos recueillis par François Hurel
La carrière sportive de Jean-François Jacob a été brève, mais les deux pilotes qu’il a navigués lui ont permis d’entrer dans la légende : « J’aimais mon métier d’ingénieur des Travaux publics et je n’ai jamais aspiré à devenir coéquipier professionnel. J’avais la chance d’avoir un patron compréhensif et passionné de mécanique. Il fallait seulement que je lui raconte comment ça s’était passé, c’était le deal. »
Comme beaucoup à cette époque, notre homme est arrivé dans le sport automobile parce que c’était dans l’air du temps. « En rentrant de mon service militaire en Afrique noire, un copain de promo m’a convaincu d’acheter une Triumph TR4, en me disant qu’on allait faire du rallye et que ce serait formidable. C’était en 1964 et j’ai disputé ma première course à Turckheim- Trois Epis. J’ai fait un assez bon résultat et le lendemain, Monsieur Thibierge m’a appelé pour me proposer d’amener ma voiture chez Triumph. J’ai ensuite couru à Montlhéry mais ça s’est moins bien passé. Puis j’ai disputé mon premier rallye, les 6 Heures de Saint- Cloud, avec mon copain comme coéquipier. C’est là que j’ai compris que je n’avais ni les moyens ni le talent pour aller bien loin et j’ai décidé d’arrêter. »
Trois mois après, le téléphone sonne. Thibierge est encore au bout du fil : « C’est dommage que vous arrêtiez, vous pourriez devenir coéquipier. Nous avons un pilote, Jean-François Piot, voulez-vous partir avec lui ? » Voilà comment l’ex-apprenti-pilote Jacob s’est retrouvé coéquipier du plus grand espoir des rallyes français : « Je m’entendais bien avec Piot, avec lequel je partageais d’autres centres d’intérêt que la course. Il pouvait tour à tour être charmant, déconneur ou secret : il ne voulait jamais que je donne nos temps aux autres. Il était très doué, surtout au volant de petites voitures. En cours de saison, il m’a dit : “ Il y a un rallye formidable, la Coupe des Alpes. Si tu as un peu de sous, on achète une R8 Gordini et on y va ! ” Et là, on a tapé toutes les Renault d’usine. Le lendemain, Jacques Féret nous a accueillis à l’assistance officielle et nous avons obtenu une Coupe des Alpes en terminant 5e au général, avec deux secondes d’avance sur Vinatier. »
Une « Gorde » en folie dans La Chartreuse
La plus belle victoire du duo Piot-Jacob est obtenue au Tour de Corse 1966, mais avant cela, il y avait eu la découverte du Monte-Carlo. C’était encore l’époque des classements alambiqués puisqu’un handicap de 18 % était attribué aux Groupe 2 et 3, dont les R8 Gordini. « Les organisateurs faisaient des mises au point continuelles et cela donnait lieu à des contestations sans nom. On n’avait aucune chance mais on a signé une course extraordinaire, notamment dans la Chartreuse. Le chasse-neige venait de passer et on partait 30 secondes derrière la Mini de Timo Makinen. Ce fut une poursuite invraisemblable. On apercevait parfois ses feux stop, Piot était survolté et moi aussi. Je n’ai jamais eu peur avec mes pilotes et je leur faisais une confiance absolue. A un moment, il y avait une enfilade rapide dans un village, suivie d’une large épingle à droite. 500 mètres avant, se trouvait un parking public en contrebas, avec un large escalier faisant office d’accès piéton par le haut. Quand Piot est arrivé, il a vu les traces et je l’entend encore me dire : “ Est-ce qu’il est passé là, ce con ? ” en parlant de Makinen. Et donc… Dddrrrrrrrr… nous avons dévalé les escaliers et nous avons retrouvé la route de l’autre côté. On a bien gagné 15 à 20 secondes et on a fait le 3e temps derrière Makinen. On était dans le coup, mais avant le Ventoux, l’assistance n’a pas eu le temps de changer nos pneus. Nos Rengas-Ala avaient des pointes de 21 mm de long et il y en avait 1 200 autour du pneu. Dans la neige, c’était formidable, mais dès que nous étions sur du goudron ou du verglas, ça n’accrochait pas. Ces sortes de brosses métalliques se déformaient et la conduite devenait louvoyante. C’est pour ça que nous sommes sortis. Nous avons glissé sur une plaque de glace et nous sommes allés dire bonjour à la porte d’un immeuble. On s’est traîné jusqu’à l’assistance de Bédoin, à 20 km de là. Vinatier nous a rattrapés et a prévenu l’assistance, qui nous attendait avec des piquets et une masse pour redresser la carrosserie. La scène a été filmée par Claude Lelouch et on la voit dans « Un homme et une femme ». Notre participation cinématographique s’est arrêtée là, nous avons continué avec une voiture tordue, mais nous sommes tombés dans le trou 300 km plus loin. »[...]
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