Gilles Panizzi (Monte-Carlo 1999) : «On était plus fort que Makinen»

Gilles PanizziFort de sept succès en WRC, tous obtenus en Corse, au Sanremo et au Catalunya, unanimement reconnu comme le «Tarmac Expert», Gilles Panizzi est pourtant persuadé qu’il aurait pu s’illustrer sur d’autres terrains. Sa prestation lors d’un Monte-Carlo 1999 particulièrement difficile, sur une Subaru privée, est là pour le rappeler.
Propos recueillis par François Hurel, photo Christian Chiquello, archives Echappement

Du temps de sa splendeur, Gilles Panizzi avait un autre surnom : Zébulon. On comprend vite pourquoi, car le plus difficile avec Gilles, c’est de l’attraper. Mais après, quel régal ! Plus vif que l’éclair, devançant nos questions, notre «Tarmac Expert» dévale les souvenirs comme on lime le bitume. Pour les irréductibles qui considèrent que le dictaphone est au journalisme ce que l’antipatinage est au pilotage, mieux vaut avoir la mine (de crayon) bien affûtée et le bloc-notes bien accroché, car les pages se noircissent à une allure vertigineuse. Ce n’est pas tous les jours qu’un privé se permet de défier les usines et quand ça arrive, on s’en souvient. En janvier 1999, Gilles Panizzi et son frère Hervé n’étaient déjà plus des débutants puisque leur palmarès faisait état de deux titres nationaux sur Peugeot 306 Maxi. Mais à 33 ans, il était temps pour Gilles de démontrer ses capacités au plus haut niveau : «La 206 WRC n’étant pas encore sortie, François Delecour et moi-même avions obtenu le feu vert de Jean-Pierre Nicolas, qui avait eu une réaction très sportive. Je voulais absolument une Subaru et j’ai monté cette opération en deux mois, à coups de bras de fer, car il fallait trouver des sous. J’avais un très bon contact avec Paul Bernard, de Cilti Sport, que je trouvais fabuleux avant même de le connaître, et dont Jean-François Mourgues m’avait dit du bien. Paul a appelé les Anglais (Prodrive, Ndlr) en leur disant qu’il avait un super jeune qui allait très vite, et à ma grande surprise, ils ont accepté de réduire la facture de moitié. J’ai apprécié le geste et en ramant, j’ai fini par trouver le nécessaire. Il fallait aussi bien assurer la voiture car elle devait disputer le Championnat de France avec un autre pilote. J’ai passé des journées au téléphone, c’était usant, mais j’ai fini par être au départ dans les conditions que je souhaitais. Cilti Sport était basé au Pôle Mécanique d’Alès. Il y avait dans l’équipe un super ingénieur qui est devenu ensuite celui de Richard Burns. J’avais déjà l’habitude de développer les Peugeot, ce gars était un gros calibre et il m’a mis à l’aise. J’ai appelé Alain Cognard, qui s’occupait de notre intendance avec son motorhome. Lui aussi a accepté de m’aider pour une poignée de figues… je ne remercierais jamais assez ceux qui m’ont aidé dans cette aventure.»

Le petit plus en moins
Gilles doit maintenant découvrir cette Impreza WRC semblable à celle qu’utilisaient les pilotes d’usine en fin de saison précédente. C’est sa première expérience au volant d’une voiture de ce type : «Nous sommes partis faire une journée d’essais en Ardèche, où j’ai découvert une auto magnifique. Puis une autre du côté de Corps. Nous avons eu un problème de boîte, mais l’Anglais s’est démené. Il a fait démonter la boîte, est allé en voiture chercher les pièces auprès de l’équipe d’usine qui s’entraînait ailleurs, et le lendemain matin, l’auto était prête : énorme ! J’avais eu un peu de verglas mais pas de neige. Alain Cognard a arrangé ça d’un coup de fil, en faisant fermer 4 km de route enneigée dans le Glandon. Nous voilà donc tous partis dans le Glandon et ce fut une journée magnifique. L’auto avait un équilibre incroyable, elle était facile à régler. Suite à cela, j’ai demandé au maire si je pouvais rouler deux ou trois heures sur la partie asphaltée et une heure plus tard, j’obtenais l’autorisation ! Ainsi, j’avais pu faire près de trois jours d’essais en roulant sur toutes les surfaces. Michelin avait mis à notre disposition un bon contingent de pneus, tout le monde avait fait un effort et j’étais préparé presque comme un pro. Le seul problème c’était les ouvreurs. J’avais mon équipe habituelle, qui était sous contrat Peugeot et à qui j’avais donné une enveloppe. Mais je n’avais pas les moyens d’installer un relais-radio dans l’avion de la FIA, comme les usines. C’était le petit plus pour lequel je n’avais plus d’argent. C’est là, très sincèrement, qu’on s’est cassé la figure, car les téléphones portables sur lesquels on comptait passaient moins bien que prévu. Parfois, j’avais de mauvaises informations. Hervé arrivait à corriger virage par virage grâce aux infos téléphoniques, on regardait ce que faisaient les usines, et on se reposait sur les ouvreurs de Michelin, mais ça n’a pas suffi pour éviter de mauvais choix. Avec le recul, je pense qu’on pouvait survoler le rallye, on était plus forts que Makinen ! En fait, je devais me battre contre moi-même car je n’avais pas toujours les bonnes infos et il fallait faire des choix. Mais quand on avait les bons pneus, on pétait des temps. Ce n’était pas un Monte-Carlo facile et si j’avais pu mettre le relais dans l’avion, ça m’aurait sauvé. Mais quand on n’a plus de sous, on va à l’essentiel.»

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